Anémones et poissons-clowns
Généralités
Les poissons-clowns, de la famille des Pomacentridés, représentent 31 espèces des genres Amphiprion (29) et Premnas (2). Ce sont des poissons n’excédant pas 10 cm pour les Amphiprions et jusqu’à 16 cm pour les Premnas. Leurs habitats se situent dans les lagons et les récifs coralliens de la zone Indopacifique ainsi qu’en Mer Rouge.
Bien connus pour leur symbiose avec certaines anémones de mer, on en sait souvent moins sur eux qu’on ne le pense.
Chez les poissons-clowns, c’est la femelle qui domine et elle se mettra en couple stable avec un mâle sexuellement mature, les autres individus gravitant autour du couple ne participant pas à la reproduction. S’il n’y a pas de dimorphisme apparent au niveau de leur couleur, on peut noter que la femelle est généralement plus grande que le mâle.
En dehors de leur symbiose avec les anémones de mer, leur autre particularité est un hermaphrodisme successif (ou séquentiel) protandre, ce qui signifie que les organes mâles et femelles ne sont pas matures en même temps, ce qui évite l’autofécondation. Le poisson sera mâle une partie de sa vie et femelle ensuite. Par opposition, un poisson hermaphrodite protogyne sera d’abord femelle, puis mâle.
Leurs couleurs sont en général dans les tons jaunes, orangés ou rouges et, selon les espèces, peuvent présenter de 1 à 3 bandes blanches, composées d’iridophores qui renvoient la lumière. Le mélanisme est également présent sous l’apparence de marques noires mais il est induit par l’anémone-hôte et l’on ne sait pas encore pourquoi.
Une variété peut présenter des dessins en « dentelle » plus ou moins développés, Premnas Epigrammata.
L'alimentation
Leur alimentation principale est constituée de plancton ainsi que de copépodes et de larves de tuniciers (ou Ascidies).
En aquarium, si un poisson-clown trouve un aliment trop gros pour lui, il le rapporte sur son territoire pour qu’il soit protégé par son anémone mais c’est bien souvent cette dernière qui en profite. Cela peut laisser penser que le poisson nourrit son hôte car l’anémone est carnivore, mais cela n’est pas le cas.
Si ce comportement n’a été que rarement constaté dans la nature où le poisson-clown ne trouve pas de grosses proies, il semble fréquent en aquarium.
Il est difficile d’estimer l’espérance de vie des poissons-clowns car celle-ci est directement liée à la protection de l’anémone-hôte. De même, la taille d’un poisson-clown n’est pas inhérente à son âge mais à la structure sociale du groupe. Un poisson subadulte n’est pas forcément un animal jeune. En revanche, la femelle dominante est toujours la plus âgée.
La reproduction
Les couples de poissons-clowns sont stables et peuvent durer des années mais pour la reproduction, tout dépend de la zone de vie du poisson-clown : en zone tropicale, elle a lieu toute l’année avec des pics et dans les zones subtropicales ou chaudes, elle se limite au printemps et à l’été quand la température de l’eau est la plus chaude.
Il semble exister, pour certaines espèces, un lien avec le cycle lunaire, la ponte intervenant à la pleine lune, l’éclat de cette dernière, le gardant en alerte, lui permet d’assurer la surveillance du nid.
Plusieurs jours avant la ponte, on peut observer une augmentation de l’’activité des poissons caractérisée par des courses-poursuites, l’érection des nageoires et la fabrication d’un nid. Le mâle exécute ensuite une nage rapide de haut en bas (« signal jumping ») pour attirer l’attention de la femelle puis s’exhibe devant elle toutes nageoires déployées.
Pour la construction du nid, le mâle choisit une surface solide et nue très proche de l’anémone-hôte, allant même jusqu’à mordiller les tentacules pour qu’ils se rétractent et fassent de la place sous son disque.
Pour les espèces d’anémones vivant sur le sable, le problème est autre et le poisson doit rapporter de quoi faire un support de ponte. Il ira donc chercher des morceaux de coquillages ou tests d’oursins et tout ce qui peut faire l’affaire.
Une fois le site de ponte bien nettoyé, la femelle rejoint le mâle. La ponte a généralement lieu le matin et dure de 30 minutes à 2 heures. La femelle colle de 600 à 1600 œufs à l’aide de son ovipositeur, le mâle la suivant de près pour les féconder. Le mâle s’occupe ensuite de surveiller et ventiler les œufs, retirant les débris et les œufs non fécondés.
Les œufs de 3-4 mm sont ovales et collés au support par une petite touffe de filaments collants et ils écloront au bout d’une semaine.
Les larves
Une fois les œufs éclos, intervient le stade larvaire qui durera 8 à 12 jours et où les larves Les œufs de 3-4 mm sont ovales et collés au support par une petite touffe de filaments collants et ils écloront au bout d’une semaine.transparentes de 3-4 mm vont remonter en surface et se laisser porter passivement par les courants. Au bout de ce laps de temps, les larves redescendent au fond où elles se transformeront en juvéniles qui arboreront leurs premières couleurs.
Il est vital à ce stade que les jeunes poissons trouve leur anémone-hôte pour ne pas se faire dévorer par des prédateurs. Certains repèrent leur anémone au pif, ou à vue ou encore, en suivant un marqueur chimique produit par l’anémone.
Le jeune poisson doit encore s’acclimater à son anémone pour être immunisé contre son pouvoir urticant et comme il y a beaucoup moins d’anémones disponibles que de poissons, la lutte est rude et les pertes énormes.
L'immunité
On ne sait toujours pas vraiment comment le poisson-clown est immunisé du contact urticant de l’anémone et les spéculations vont bon train. Néanmoins, plusieurs théories courent sur le sujet.
On sait quand même que c’est le mucus présent sur le corps du poisson qui le protège mais il n'est pas clairement établi si le mucus est produit par le poisson lui-même, par l'anémone ou par les deux. En 2000, une équipe de recherche israélienne met en évidence dans le mucus extracorporel de l'anémone un composé qui neutralise la contraction des cnidocytes (organite venimeux capable de libérer une substance urticante). Un poisson-clown récemment introduit dans une anémone, ira se frotter dans ses tentacules, peut-être pour se recouvrir de ce mucus. C'est en « ressentant » ce mucus que l'anémone ne se pique pas elle-même lorsque ses tentacules se touchent. Les poissons pourraient utiliser cette propriété à leur avantage. D'autre part, il y a aussi des preuves que le propre mucus des poissons-clowns les protège des anémones.
Quel bénéfice pour l'anémone ?
Outre le fait que les poissons-clowns débarrassent les anémones d’éventuels prédateurs, ces dernières possèdent des Zooxanthelles dans l’endoderme de leur tentacule (feuillet cellulaire). Ces zooxanthelles sont des algues unicellulaires auxquelles les déjections et les débris alimentaires des poissons-clowns profitent fort bien (ammoniac, phosphates), elles favorisent la photosynthèse qui profite directement à l’anémone sous forme d’une énergie directement assimilable : l’énergie solaire ! Cette énergie est la première et principale source d’énergie des anémones.
Son anatomie
C’est un cnidaire comme les polypes, qui forment les coraux, et les méduses. L’anémone est un polype solitaire sans squelette calcaire.
Elles sont généralement sédentaires mais peuvent également se déplacer par reptation, certaines étant même capables de nager en cas d’agression.
L'alimentation
Outre l’énergie générée par l’activité des zooxanthelles, elle complète son alimentation avec du plancton, des crevettes ou de petits poissons qu’elle attrape avec ses tentacules.
D'autres symbioses ?
Et oui, chacun sa parade, les poissons-clowns sont couverts de mucus mais il y a d’autres moyens de se protéger : les carapaces ! Les crustacés ne sont pas rares à s’inviter et même à emmener leur hôte avec eux comme Dardanus Deformis, un Bernard-l’hermite.
On retrouve également, dans huit espèces de nos anémones, des Demoiselles à Trois Points (Dascyllus Trimaculatus). Les Dascyllus adultes ne vivent pas dans une anémone mais à proximité, en revanche, leurs alevins y plongent en cas de danger et y restent jusqu’à ce qu’il soit écarté. On peut trouver jusqu’à 60 individus dans une seule grande anémone. C’est un poisson grégaire qui se déplace en grand groupe.
Les anemones-hôtes
Elles sont fort peu à accueillir les poissons-clowns : dix ! Et pas une de plus ! Enfin, pour l’instant...
Anémone Adhésive ou Anémone Pizza (Cryptodendrum Adhaesivum)
Cette anémone accepte que les Amphiprion Allardi et Clarkii ainsi que les Demoiselles à Trois Points.
Indopacifique, elle atteint un diamètre de 30 à 35 cm et vit sur les fonds sableux, à la limite du décor, elle n’aime pas tellement le courant. En aquarium, elle est à placer dans un endroit calme. Attention, aux coraux dont il faut l’éloigner sinon ils feront les frais de son agressivité (brulures).
Anémone à bouts renflés (Entacmaea Quadricolor)
C’est la seule espèce à posséder ces renflements mais ils n’apparaissent que si elle est habitée par un poisson-clown (commensal). Elle peut accueillir la grande majorité des poissons-clowns ainsi que des Demoiselles à Trois points.
Anémone Collier de Perle (Heteractis Aurora)
Une autre anémone des sables qui atteint un diamètre de 30 à 40 cm. Vivant exclusivement sur le sable, il faudra lui aménager de larges plages de sable. Il sera aisé de placer vos coraux sur les roches afin de leur éviter le contact de cette anémone agressive. Pour se développer, elle aura besoin d’un fort éclairage pour nourrir ses zooxanthelles, n’oublions pas qu’elles sont leur première source d’énergie.
Anémone Cuir (Heteractis Crispa)
Cette anémone résistante aime le courant et un bon éclairage, et elle peut se fixer à peu près où elle veut. Elle se déplace et risque de brûler les coraux sur son passage. Elle peut accueillir bon nombre de poissons-clowns ainsi que des Dascyllus.
Anémone Magnifique ou Anémone à Pied rouge (Heteractis Magnifica)
Heteractis Magnifica a la particularité de viser le point le plus haut dans l’aquarium, pour éviter qu’elle ne le recherche et brûle vos coraux sur son passage, installez-la sur une hauteur de pierres vivantes, avec un bon brassage et un bon éclairage. Elle aussi accepte de nombreux colocataires.
Anémone Délicate (Heteractis Malu)
De 30 à 40 cm de diamètre, cette anémone originaire d’Hawaï n’aime pas le courant mais doit pouvoir bénéficier d’une très forte lumière (HQI). Elle vit exclusivement sur le sable et est assez fragile. On la nourrit de morceaux de poissons, de moules et autres aliments carnés.
Anémone Tire-bouchon (Macrodactyla Doreensis)
Elle doit son nom à ses tentacules qui, quand ils sont jeunes, présentent une forme en tire-bouchon qui s’estompe avec l’âge. Bien qu’elle vive sur le sable, elle aime les courants forts ce qui pose problème en aquarium. Elle préfère en général le fond de l’aquarium et il faudra garder les coraux hors de sa portée. Elle peut accueillir les amphiprions Clarkii, Perideraion et Polymnus et les Dascyllus.
Anémone Carpette (Stichodactyla Gigantea)
De 40 à 50 cm, elle est originaire de la zone indopacifique et des Caraïbes. C’est une anémone qui vit exclusivement sur le fond et il est donc assez facile de la placer à l’endroit voulu dans l’aquarium. Elle nécessite un très bon éclairage et une bonne épaisseur de sable où elle pourra enfoncer son pied pour s’ancrer. En plus des zooxanthelles, on pourra la nourrir avec des morceaux de poissons ou de crevettes une fois par semaine. C’est une anémone résistante qui accueille de nombreux commensaux.
Anémone de Haddon (Stichodactyla Haddoni)
Autre anémone-carpette, et comme la précédente, elle préfère le fond de l’aquarium où elle pourra trouver assez de sable pour s’ancrer. On la nourrira aussi avec de petits cubes de poisson ou des morceaux de crevette.
Anémone de Mertens (Stichodactyla Mertensii)
Jusqu’à un mètre de diamètre et l’on comprendra aisément que cette anémone n’ait sa place que dans de très grands aquariums pour qu’elle puisse s’épanouir.
Elle aussi s’ancrera dans le sable et il est facile de prévoir à quel emplacement on peut l’installer pour préserver les coraux de son agressivité. Elle accepte une bonne partie des poissons-clowns et Dascyllus.
Qui abrite qui ?
Voici un petit tableau des diverses associations entre anémones et poissons-clowns. Bien que les Dascyllus Trimaculatus ne soient pas des poissons-clowns, ils sont bien souvent présents dans leurs environs immédiats, ils ont donc été ajoutés dans le tableau suivant.